Fontaine de Moïse - Fontaine de l'Acqua Felice

Sur la Piazza San Bernardo, dans le Rione Castro Pretorio, se trouve cette fontaine monumentale construite entre 1585 et 1589, d'après un projet de Domenico Fontana, architecte favori de Sixte Quint et auteur de nombreux projets de construction avec lesquels le "pape dur" a renouvelé le visage de la ville à la fin du XVIe siècle.

La fontaine constitue la terminaison de l'Aqueduc Félix qui, reprenant en partie l'ancienne Aqua Alexandrina, servait à alimenter en eau les collines du Quirinal, du Viminal et de l'Esquilin, où s'élevait également la magnifique Villa Montalto, propriété du pape lui-même, Felice Peretti.

Dans la niche de l'arc central se trouve l'imposante statue de Moïse, œuvre de Prospero Antichi complétée par Leonardo Sormani. Dans les niches latérales se trouvent des bas-reliefs de sujets bibliques, réalisés par Flaminio Vacca et Pietro Paolo Olivieri - à droite - et par Giovanni Battista della Porta - à gauche.

D'une fausse falaise en marbre cipollin, placée à la base des niches, l'eau jaillit dans les bassins ornés de quatre lions en marbre bardiglio réalisés en 1850 par Adamo Tadolini pour remplacer les anciens originaux en porphyre et en marbre, qui provenaient du Panthéon et du Latran et se trouvent aujourd'hui dans les Musées du Vatican.

Un vaste grenier abrite la longue inscription commémorative en latin de l'œuvre, qui se lit comme suit : "SISTVS V PONT. MAX. PICENVS AQVAM EX AGRO COLVMNAE VIA PRAENEST. SINISTRORSVM MVLTAR. COLLECTIONE VENARVM DVCTV SINVOSO A RECEPTACVLO MIL. XX A CAPITE XXII ADDVXIT FELICEMQ. DE NOMINE ANTE PONT. DIXIT" (Le pape Sixte Quint Piceno, originaire de la campagne de Colonna, à gauche de la Via Prenestina, a recueilli l'eau de nombreuses sources du vingtième au vingt-deuxième mille, à travers un conduit sinueux, et l'a baptisée Félix, d'après le nom qu'il portait avant de devenir pontife) et est surmontée des armoiries papales soutenues par deux anges et flanquées de deux petits obélisques. La seconde inscription, également en latin, sous la corniche de l'attique, se lit comme suit : "COEPIT PONT. AN. I ABSOLVIT III MDLXXXVII" ((les travaux) commencés la 1ère et terminés la 3ème année du pontificat 1587).

À la base, une balustrade en travertin, réalisée à l'époque de Pie IV pour la cour du Belvédère au Vatican, entoure l'œuvre en travertin, marbre et stuc, qui rappelle la forme d'un arc de triomphe avec trois grandes niches, encadré par quatre colonnes de marbre coloré.

La statue de Moïse qui se dresse au centre de la fontaine fut la protagoniste d'une curieuse controverse : réalisée, comme nous l'avons vu, par Prospero Antichi et Leonardo Sormani, et inspirée de celle, beaucoup plus célèbre, de Michel-Ange, visible aujourd'hui dans la basilique de San Pietro in Vincoli, elle fut sévèrement critiquée surtout pour une inexactitude historique : Moïse montre l'eau qui jaillit prodigieusement du marbre et tient dans ses mains les Tables de la Loi, qu'il n'avait cependant pas encore reçues de Dieu au moment du miracle. Il devient ainsi l'objet de la célèbre ironie des Romains, qui le surnomment le "Moïse ridicule", et de pasquinades astucieuses telles que :

“Guardo con occhio torvo/l'acqua che sgorga ai pié/pensando inorridito/al danno che a lui fe'/uno scultor stordito” et “È buona l'acqua fresca e la fontana è bella/Con quel mostro di sopra però non è più quella/O tu, Sisto, che tanto tieni alla tua parola/Il nuovo Michelangelo impicca per la gola”.

"Je regarde d'un œil sinistre/l'eau qui jaillit à ses pieds/je pense avec horreur/au dommage que lui a causé/un sculpteur stupéfait" et "L'eau fraîche est bonne et la fontaine est belle/avec ce monstre au-dessus, cependant, ce n'est plus cela/O toi, Sixte, qui tiens tant à ta parole/Le nouveau Michel-Ange pend à la gorge".

En fait, la statue était également connue sous le nom de "Moïse laid" en raison de ses traits trapus et disgracieux, comparés aux traits parfaits du chef-d'œuvre de Michel-Ange.

Photo : Redazione Turismo Roma